Le Passager nous dresse le portrait d’un enfant passionné, prêt à tout pour atteindre son but. Kiarostami parvient à saisir parfaitement la fougue et les paradoxes du monde de l’enfance, et à le représenter avec beaucoup de justesse, à travers ses envies, ses espoirs et ses rêves. Le match de football auquel rêve d'assister notre jeune héros n’est en réalité qu’un prétexte, le film n’étant en aucun cas réservé aux adeptes du ballon rond. L’important ici n’est pas ce qui nous attend au bout de la route, mais le chemin pour y parvenir.
Le réalisateur a également à cœur, au travers de ses films, d’illustrer un pan de la société iranienne ainsi que la complexité des rapports sociaux et familiaux. Dans chacune de ses relations, Gassem est confronté à des violences physiques et psychologiques. C’est pour cette raison qu’il affectionne la rue, lieu de découvertes et de liberté, où les règles des adultes sont absentes. Peu intéressé par l’école et encore moins par ses devoirs, Gassem ne montre aucune considération pour les règles qui lui sont imposées et les transgresse sans états d’âme. Mais bien que ses actes soient répréhensibles et présentés comme tels, le spectateur se prend d’affection pour lui et devient rapidement son complice. Le Passager est un film qui tente avant tout d’appréhender l’universalité de l’enfance, son opposition au monde et aux règles des adultes qui semblent parfois injustes car incomprises. Dans une certaine mesure, le film pose également la question de l’accomplissement du rêve chez l’adulte. Sommes-nous moins passionnés en grandissant, ou sommes-nous juste brimés par les conventions sociales ? C’est une des interrogations qui rendent aussi passionnants les films traitant de l’enfance pour toutes les générations.
La mise en scène très classique laisse au spectateur le temps de l’observation, et le choix du noir et blanc confère au film un réalisme poétique qui nous emporte dans un autre temps. Le passager est un film d'une très grande justesse et plein de charme, pour toute la famille.