Si Princes et Princesses se présentait comme un théâtre d'ombres aux silhouettes noires aplaties sur des fonds colorés, Les 3 Inventeurs, du même réalisateur, confère à ses figures davantage de relief et une matière plus délicate. Mélangeant papier découpé, pliage et animation image par image, la mise en scène est un véritable tour de force : la sophistication des personnages et des décors en papier, animés avec une précision qui impressionne à chaque plan, contraste avec la fragilité et la délicatesse du matériau dont ils sont faits. Ce film virtuose, tout en dentelle de papier, est un hymne à l'invention, à l'artisanat et à la liberté de création. Mais face aux conservateurs de la société, pour qui le mot « progrès » est signe de menace à l'ordre établi, les trois inventeurs vont être victimes de l'incompréhension et de la virulence de la population. Ainsi, ils seront injustement malmenés par la bêtise humaine et la violence. Le film prend alors une dimension plus politique : c'est avant tout la critique acerbe d'une société intolérante à tout ce qui peut être nouveau ; une société repliée sur elle-même et incapable de tirer profit du génie de ses plus brillants créateurs, préférant sombrer dans la haine la plus stupide.
Il n'y a pas un seul plan dans ce court métrage sublime qui ne sidère autant qu'il émeut. Un travail d'orfèvre réalisé d'une main de maître par le grand Michel Ocelot !