Le film peut sembler un peu vieillot au premier abord, avec ses acteurs aux accents titi parisien, sa postsynchronisation bancale et ses trucages « à la Méliès ». Mais ce côté daté se révèle être à la fois plein de charme, empli d’une certaine poésie désuète, ainsi qu’un témoin de son époque. Le film étant sorti en 1958, sa production s’est déroulée dans un certain contexte historique, celui de la guerre froide. A une époque de tension entre les pays, la volonté des personnes à l’origine de ce film a été de porter une vision de paix et d’amitié universelle. La fraîcheur et la naïveté qui se dégagent de l’histoire et de ses petits protagonistes, seraient en fait un message d’espoir et de fraternité entre les peuples. On peut aussi, tout simplement, expliquer cette candeur par l’onirisme dans lequel baigne le film. En effet, la moitié du récit se consacre à nous emmener dans les rêves de Pierrot, propulsé en Chine avec sa petite sœur grâce aux pouvoir du cerf-volant qui s’avère être Souen Wou Kong, le roi des singes, un célèbre personnage de la mythologie chinoise. Si c’est un rêve, tout est possible, même arriver en Chine en un clin d’œil et rencontrer une bande d’enfants prêts à se mobiliser pour aider Pierrot à retrouver Song Tsiao Sing.
Le voyage que font Pierrot et sa sœur n’est pas seulement onirique, il a aussi une vocation initiatique : aller à la rencontre de l’autre, d’une autre culture. Le film dresse ainsi le portrait – certes quelque peu fantasmé – de la Chine, de son histoire (les apparitions des empereurs de jadis), de sa culture (la langue, la nourriture, les cerfs-volants), et de ses légendes (le personnage de Souen Wou Kong). Tout le film évolue dans un univers d’enfants - on constate très peu d’interventions des adultes - et nous raconte ainsi une forme d'émancipation, d’indépendance des enfants. Cela nous renvoie au regard un peu naïf que le film porte sur l’amitié et, par extension, sur la paix. Comme s’il y avait besoin de cette candeur pour pouvoir y croire, le monde des adultes étant déjà trop désabusé, trop désenchanté. Les enfants représentent ainsi un espoir, symboles d’une nouvelle génération plus sereine et peut-être plus sage. Un message qui, aujourd’hui encore, trouve un écho.