C'est sur un jeu autour des rapports d'échelle et un réseau de contrastes et d'oppositions que repose le délirant court métrage d'animation Johnny express.
Le titre du film lui-même résonne de manière toute ironique : est-ce bien lui ce fameux coursier spatial, ce « Johnny express » si efficace, cet homme à l'œil morne dont le sol de la navette est jonché de détritus ? Quand celle-ci se pose sur la planète où vit le destinataire du colis à livrer, le spectateur a une impression de grandeur. Mais, avec un effet de dézoom qui modifie l'échelle de plan, la navette occupe presque tout le sol d'une désormais toute petite planète. Le nonchalant Johnny est vêtu d'une combinaison spatiale blanche, depuis laquelle il sirote paresseusement un soda. A l'inverse, le minuscule destinataire du microscopique colis qu'il est censé livrer est un alien violet gesticulant au visage hyper expressif. Un grossissement puissant est nécessaire pour le voir ! Ainsi, l'humour du film repose sur de permanents changements d'échelles de plan, liés souvent à des effets de zoom et dézoom, qui mettent en valeur des personnages et un décor tout en contrastes.
L'humour et le burlesque du film repose sur ce réseau d'oppositions. Ce qui paraît grand est en fait tout petit, et vice versa… selon le point de vue ! Si, pour Johnny, le colis à livrer est minuscule, la canette de soda est, pour son destinataire, aussi grande qu'une navette spatiale. Les enfants pourront facilement s'amuser de ces rapports d'échelle et des effets produits : grand/petit, haut/bas, de près/de loin, mais de quel point de vue ? Qui voit et depuis quel endroit ? Cet aspect burlesque du film - de l'italien burlesco, qui signifie « farce, plaisanterie » - s'appuie également sur de nombreux effets d'exagération. Prenons pour exemple le zoom à 5500% nécessaire à Johnny pour identifier le destinataire du colis. Quant à la fin, l'effet de chute sur laquelle elle est construite, est bien ironique : la mission n'est-elle pas, en effet, accomplie ? Lorsque corps et décors sont mis à mal jusqu'à la destruction finale, c'est alors, un rire – bien cruel ! - qui l'emporte.