Sorti en 1947, Much Ado About Mutton, selon son titre original, est le dernier court métrage d’une série de quatre courts métrages mettant en scène un loup affamé (Wolfie) et un agneau noir redoutable, Oncle Noiraud (Blackie).
Dans un décor désertique de canyons et de plaines arides d’Amérique du Nord, trois jeunes agneaux innocents s’enthousiasment à l’idée de voir venir jouer dans leur contrée The Little Boy Blue, un célèbre trompettiste qui a le don de les faire swinguer. Les voilà partis dans un jeu de pattes endiablé tout à fait irrésistible lorsque l’on découvre non loin d’eux le loup qui rôde. Long museau exagérément prononcé, le loup se lèche les babines à l’idée de réunir les trois agneaux au fond de son estomac. Mais ces derniers ont de la suite dans les idées : une chambre à air devenue un gigantesque élastique propulse le loup dans le paysage. S’ensuit une course-poursuite menée tambour battant, bourrée d’inventivité dramaturgique et visuelle.
Comme un joueur de flûte attirant des serpents, l’Oncle Noiraud prend la situation en main grâce à des méthodes aussi géniales que délirantes. Dans un rythme effréné, le loup se trouve tour à tour à cheval sur une moto dont les roues ne tournent plus rond, le crâne si chaud qu’on pourrait lui faire cuire un oeuf sur la tête, la bouche en feu telle un chalumeau. Dans une magnifique surenchère de gags et de situations comiques, nous nous délectons de l’éconduite du loup. Tout en crescendo, le film offre un bouquet final explosif où les notes de la victoire jouées à la trompette par l’Oncle Noiraud se mettent, tout comme les petits agneaux, à swinguer.
Présente pour rythmer l’animation, la musique nous plonge dans l’atmosphère électrique des années 40-50 où le jazz, bientôt concurrencé par le be-bop, faisait swinguer des générations entières de jeunes. En creux, le film adresse un clin d’oeil aux jeunes générations sur les risques qu’ils et elles encourent à vivre un peu trop librement. Comme le dit Oncle Noiraud dans cette réplique comique : « Si vous voulez éviter de vous faire dévorer, soyez plus prudents et arrêter de swinguer ! ».